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Photo du rédacteurMaurice Johnson-Kanyonga

Cette culture du ghetto qui mène à l’autodestruction…



Rues saccagées, voitures incendiées, mobilier urbain vandalisé, transports en commun perturbés, ambiance de guérilla urbaine, les images des émeutes qui ont éclatées dans le centre de Bruxelles après la rencontre entre la Belgique et le Maroc ont fait le tour du monde suscitant partout la même indignation.


Les réactions ont fusé de toute part, avec la plus ferme condamnation, notamment de la part des représentants politiques, certains évoquant l’appel à la tolérance zéro et d’autres des accents de grand remplacement…


Mais dans les faits, très peu d’explications concrètes sur les raisons d’un tel phénomène urbain pas si nouveau que ça et somme toute assez troublant puisqu’il s’agissait non pas d’exprimer la frustration de la défaite mais bien de célébrer la victoire après un match de football…


L’incompréhension est telle que même les plus directement touchés, les membres de la communauté marocaine de Belgique (immigrés et marocains d’origine), ne parviennent pas à expliquer la situation et ne se reconnaissent pas les actes de ces casseurs venus gâcher la fête de toute une population qui a fait les beaux jours de la Belgique et qui continue encore aujourd’hui à contribuer à la prospérité du royaume, de Fadila Laanan à Bilall Falah, en passant par Ilham Kadri ou Ibrahim Ouassari ; les exemples sont légion.


Les raisons d’un tel déchaînement de violence, de ceux qui se marginalisent toujours un peu plus, se trouvent dans le délitement des principaux piliers de la vie en société que sont : la famille, l’éducation, l’identité, le bien-être et la citoyenneté.


Le profil de ces casseurs, pour la plupart de jeunes adolescents de troisième voire même quatrième génération issus de l’immigration, est souvent le même et cumule une série de tares.


D’abord au niveau familial où l’autorité parentale fait complètement défaut et où les notions de respect de l’individu, d’autrui, des règles et du bien commun n’ont que très peu de sens. La structure familiale en elle-même est souvent déstabilisée, entre foyer monoparental : une mère qui élève seule ses enfants, famille dysfonctionnelle : une ou plusieurs personnes en proie avec le système judiciaire, incarcérées ou concernées par des problèmes d’addiction à l’alcool ou aux drogues ou famille fragilisée avec des enfants attirés trop facilement par la délinquance. Ensuite, l’éducation limitante, l’échec scolaire, les écoles à faible indice socio-culturel, l’instruction réduite et le manque de qualifications n’offrent souvent que très peu de perspectives épanouissantes et condamnent quasi automatiquement ces jeunes à la relégation et à l’exclusion.


Une rencontre entre la Belgique et le Maroc ne pouvait que déboucher sur une victoire pour quiconque porte une sorte de double nationalité, de par le fait d’avoir des racines dans le Haut Atlas et d’être né dans le terreau du plat pays. Quelle que puisse être l’issue du match, la satisfaction devenait évidente.

Pourtant d’aucun de ces vandales(1) n’était un quelconque supporter venu célébrer la fête du sport-roi. D’aucun même ne pouvait revendiquer une appartenance au Maroc, pays qu’ils connaissent en fait si peu et dont ils maîtrisent très mal la langue ; comme ils ne pouvaient prétendre à un rattachement à la Belgique, terre dont ils ne connaissent que trop peu l’histoire quand il ne s’agit pas de la vacuité en ce qui concerne l’une des trois langues nationales. La crise d’identité que traversent ces jeunes est bien plus profonde qu’il n’y paraît. Le match de foot n’était finalement qu’un prétexte qui leur donnait l’occasion d’être vus aux yeux de tous, de pouvoir s’exprimer -par le seul moyen à leur disposition, à savoir la violence des comportements primaires- avec une surenchère de celui qui oserait plus que les autres dans le seul but …d’exister.


Plus présente que l’identité, la précarité guette souvent ces jeunes issus de ce qu’on appelle pudiquement le croissant pauvre de Bruxelles qui concentre des poches de chômage des moins de 26 ans à pratiquement 75% ! Une absence de moyens matériels qui ne permet pas l’émancipation et qui exclut de facto cette frange de la population qui vit à Bruxelles mais sans lui appartenir. Pour illustrer cette réalité, il est utile de comprendre que le scintillant et chatoyant Marché de Noël de la Place Sainte-Catherine ne se trouve qu’à cinq rues du cœur des émeutes, à dix minutes à pied, montre en main. Contrairement à une ville comme Paris où le périphérique fait office de frontière physique évidente pour marquer la séparation entre le centre et ceux qui en sont exclus, Bruxelles possède une frontière invisible mais pourtant bien réelle, une barrière mentale qui coupe les quartiers les uns des autres et fait cohabiter ses habitants de façon juxtaposée sans possibilité de se côtoyer.


A cette exclusion physique et mentale vient encore s’ajouter la dimension sociale qui concerne des jeunes qui ne se retrouvent pas dans le tissu associatif -pourtant dense- de la ville et qui permet à chacun de participer, de s’émanciper et de s’épanouir sur les plans sportif, artistique, culturel, citoyen ou simplement humain.


Au contraire, ces laissés-pour-compte s’enferment dans cette culture du ghetto qui prône avant tout l’hyper-virilité et dont l’un des principaux exemples de réussite est incarné par le narcotrafiquant qui use de violence physique, morale ou psychologique dans son désir individualiste de réussite qui reflète pour trop de jeunes l’archétype du role-model qui, après avoir détruit son environnement, finira par être détrôné par ceux qui l’admiraient en ayant recours au seul mode de communication connu, celui de la violence.


Il est donc urgent de prendre la mesure d’un phénomène social, qui concentre un vivier de personnes marginalisées, en réinvestissant dans la politique des grandes villes, avec les acteurs de terrain conscients de ce que pourrait devenir cette jeunesse livrée à elle-même qui n’a pour elle que la violence la plus la plus dangereuse, celle qui mène inévitablement à l’autodestruction…


(1) Les Vandales sont un peuple germanique oriental. Ils s'illustrèrent en pillant successivement la Gaule, la Galice et la Bétique (en Espagne), l'Afrique du Nord et les îles de la Méditerranée occidentale lors des Grandes invasions, au Ve siècle de l'ère chrétienne.





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